Pendant le confinement, la direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle s’est concentré sur un plan de continuité pédagogique. Nous pouvons également constater un élan d’enthousiasme de la part des formateurs et des enseignants. Des bases de données regroupant différents outils ou astuces pour les cours virtuels étaient partagées en masse. Cet élan se porte sur le Digital Learning afin de combler tant bien que mal ce vide présentiel : le « Panic Learning » est né.
En effet, repenser sa pédagogie afin de l’orienter vers le digital en quelques jours, seul dans son coin, peut se montrer très fatiguant. Même décourageant pour certains et mission impossible pour d’autres. Si on ne le fait pas, on culpabilise vis à vis des collègues Linkedin qui ont déjà embrayé sur quelque chose. On lit et on relit les ressources (très factuelles) délivrées par le gouvernement. Panique à bord. Il faut produire.
Avant d’entreprendre quoique ce soit, faites-le intelligemment et surtout : calmement.
Créer en vitesse du contenu digital n’a fait que révéler les lacunes pédagogiques de certains. En effet, certains formateurs ont été très « descendants ». Ils se trouvent maintenant dans un engrenage de production pédagogique massive sans queue ni tête. Et ceci n’aura aucune plus-value pour l’apprenant, il n’en restera rien.
Par ailleurs, dans la conscience collective, nous pensons que le Digital Learning permet de « se reposer un peu ». Certains pensent que cela consiste à donner du grain à moudre à nos étudiants ou à nos apprenants à distance : c’est totalement faux. Ce grain, il faut le moudre avec eux, les assister et se rendre davantage disponible afin de répondre à chacun
Beaucoup, ces derniers temps, ont fait ce constat un vendredi soir, en affirmant que la pédagogie 2.0 était fatigante (création de ressources et classe virtuelle comprises). Créer des cours virtuels n’est pas évident, il faut avoir deux trois astuces pour rendre cela plus simple. Non seulement il faut repenser ses scénarios pédagogiques et les moduler pour le distanciel, mais cela nécessite une charge cognitive importante pour animer et rester à l’écoute de son public.
Ce qui reduit la fatigue, c’est en partie la notion de plaisir. Ne nous leurrons pas, apprendre est un effort, mais qui passe mieux en s’amusant. Ne vous limitez pas seulement à ce petit rectangle dans lequel vous vous trouvez sur l’écran.
Changez votre posture. Qui a dit que, parce que nous sommes derrière un écran, nous devons absolument rester assis sur une chaise de façon statique ? N’hésitez pas à vous lever, bouger, pratiquer des activités hors champs visio (le dessin, par exemple). Voir même danser ou jouer avec votre voix pour les plus audacieux. Misez sur ce que vous aimez faire et sur votre naturel. Bousculez les traditions. Ce qui sort du cadre, reste dans les mémoires. (Sans mauvais jeu de mot).
Deuxième astuce, ne surchargez pas non plus votre session de cours virtuel en items : le cerveau, le cas échéant, ne suivra pas. Faire des sessions plus courtes en proposant 2 à 3 items est amplement suffisant. Pendant le confinement, tout le monde était déjà surchargé cognitivement par les circonstances. Des formations trop complètes n’étaient pas la bonne stratégie. Certains étudiants ont été écoeurés des cours à distance pendant cette crise. Mais il est encore temps de leur montrer que les cours à distance peuvent leur apporter beaucoup !
Laissez à la disposition de vos apprenants la salle virtuelle, ne la coupez pas une fois la session terminée. Cela leur donnera la possibilité d’échanger entre eux. Beaucoup de notions incomprises ou brouillardeuses s’éclairciront peut être de cette manière. Un tutorat se mettra en place de façon naturelle. Ils s’aideront après les cours virtuels, comme un groupe d’entraide à la bibliothèque qui se donne des astuces. Cela vous permettra de palier à la double fatigue de repenser ses cours en distanciel et de rester à la disposition de son public.
Il existe énormément de solutions pour avoir accès à ces salles virtuelles, à vous de choisir.
Ne cherchez pas à tout prix à ce que la classe virtuelle soit la plus fidèle possible à celle en présentiel. Il y a des activités « réconfortantes » que vous ne retrouverez pas en distanciel (comme le travail en groupe, sous groupes). Notre routine est d’ors et déjà « cassée », autant achever le travail…
Soyons lucides, la pédagogie descendante en classe virtuelle est celle vers laquelle on se tourne par soucis de confort. Le powerpoint que l’on commente pendant 1h durant ne montre pas de résultats encourageants. Laissez aussi, pourquoi pas, un peu plus de libertés à vos apprenants durant cette période. Ils pourraient, par exemple, vous aider à co-construire ce cours virtuel, un peu comme si ce dernier était une balle de ping-pong.
Si pour vous le virtuel n’est pas votre tasse de thé, dites-vous que c’est probablement la leur.
N’hésitez pas non plus à lancer des petits challenges hebdomadaires pour votre groupe, profitez du vendredi après-midi pour discuter des résultats obtenus et « d’élire un vainqueur ».
Faites un point régulier afin de cerner leurs attentes et de créer un moment de partage pendant lequel vous aurez l’occasion de récupérer leurs avis sur les cours que vous dispensez. Dans la pédagogie 2.0, vous apprendrez autant qu’eux. De plus, ces moments d’interaction permettent de réduire la fatigue.
N’hésitez pas à prendre des idées d’autres formateurs sur le web ! De nombreux sites existent et peuvent vous proposer des scénarios pédagogiques intéressants. Il y en a vraiment pour tout le monde. Inspirez vous également de vidéos pédagogiques déjà existantes. Nous avons réalisé un article sur les MOOC français avec des conseils techniques. Peut être que ceci pourra vous aider à y voir plus clair : 7 ASTUCES POUR RÉUSSIR SA CLASSE VIRTUELLE ! — Live Session
Enfin, la classe virtuelle ainsi que la création de contenu digital, c’est comme un bon vieux entraînement de sport. Plus on s’entraîne, plus on progresse et plus on réussit à tenir l’effort.
Vous l’aurez compris à l’issue de cet article, se sentir démuni et fatigué est quelque chose de tout à fait normal lorsqu’on nous demande de s’adapter en quelques jours/semaines seulement à une nouvelle manière de faire cours (d’autant plus que cela constitue un métier à part entière).
Produire moins n’est pas un problème, misez sur la qualité. Le réel challenge ici est de construire quelque chose qui reste, qui sera utile aussi bien pour vous que pour vos apprenants. Vous pourrez ainsi garder en présentiel certaines de vos pratiques virtuelles, auxquelles vous n’auriez peut-être même pas pensé si cette dernière n’avait pas eu lieu.
*Article inspiré de l’échange Episode 05 : Comment tenir dans la durée ? – ILDI International Learning & Development Institute